Main dans la main… l’État et les néofascistes

bulletin numero 173 - mai - juin 2018


23 mai 2018


Main dans la main… l’État et les néofascistes

RESISTONS ENSEMBLE - bulletin numéro 173 – mai/juin 2018


Main dans la main… l’État et les néofascistes

Le col de l’Echelle (Hautes-Alpes), à 1762 mètres d’altitude, est actuellement couvert de neige, il sépare la France de l’Italie. Les routes sont coupées. Un groupe grimpe, raquettes aux pieds, soutenu par 2 hélicoptères (!), avion et drones… Pour sauver des alpinistes en danger ? Vous n’y êtes pas du tout. Il s’agit d’une centaine de néofascistes de« Génération identitaire », des français, des hongrois, des italiens… qui sont partis à la chasse aux migrants (comme déjà en août dernier avec le navire CSTAR en chasse sur la mer méditerranée voir RE 165).
Avec leur banderole déployée « Defend Europe » et des grillages en plastique, leur but est de repousser des migrants à bout de forces, gelés, vers l’Italie. Cette expédition spectaculaire était surveillée par les gendarmes, mais ils ont laissé faire. Mis à part un communiqué bidon, la justice classe l’affaire et les néofascistes jubilent.
Alors que des militants qui ont secouru des migrants sur un col voisin en réaction à la marche de la Génération identitaire, eux sont poursuivis et risquent 5 ans de prison comme les « trois de Briançon » qui passent au tribunal de Gap le 31 mai.
Deux poids, deux mesures ? Non c’est plus que ça. La nouvelle loi « asile et immigration » maintient le « délit de solidarité »pour toute aide portée aux migrants voulant franchir une frontière . Les néofascistes n’ont fait que mettre en pratique l’esprit de cette loi en rejetant dans la neige, éventuellement vers la mort des migrants exténués. Ils partagent le sale boulot avec les forces de répression « légales » dont les harcèlements peuvent mener a la mort, comme celle de Blessing, 20 ans, morte noyée à la frontière côté français. C’est pourquoi l’État ne les poursuit pas et laisse sévir les milices fascistes en tant que « garde-frontières ».
Le silence du mouvement social autour de ce nouveau développement est assourdissant. Dénoncer cette complicité de fait du gouvernement avec les néofascistes, la répression contre les migrants, et exiger la liberté pour tous militants solidaires est urgent et vital. Rappelons-nous la bête immonde, une fois lâchée, nous bouffera tous.


Déborder mais vers où ?

Cette année à Paris pour la manif du 1er mai, ce que l’on a maintenant coutume d’appeler depuis le mouvement contre la loi El Khomry de 2016 (voir édito de RE 154) le « cortège de tête » a été rejoint par près de 14000 personnes : une première ! Il n’est plus très loin de constituer le plus gros du cortège reléguant « en queue » un cortège syndical réduit à sa portion congrue. La réponse de l’État a consisté à saisir le premier prétexte tendu (le saccage d’un Mac Do) pour nasser les manifestants sur le pont d’Austerlitz et les asperger copieusement de gaz durant plus d’une heure, en interpeler 200, en mettre en GAV des dizaines dont certains ont été inculpés, jugés ou sont en voie de l’être et à organiser une très forte médiatisation de l’évènement. Alors qu’est-ce qui fait peur à l’État dans ce « cortège de tête » au point où il use de toutes les manœuvres pour obtenir sa dissolution ? Est-ce bien comme veulent nous le faire croire les médias, une peur du pouvoir de destruction et de déstabilisation de ces « méchants casseurs », de ces « hordes de black blocs venus de toute l’Europe », de ces « violents anarchistes » ? Pas sûr du tout. Depuis le début, le cortège de tête se distingue par une volonté de débordement qui certes se concrétise par des pratiques hors du cadre imposé par les syndicats traditionnels (affrontements avec la police, départ en manifs sauvages, tags et casse...), mais plus essentiellement par une volonté de rompre avec leurs mots d’ordre en remettant en cause radicalement l’ordre capitaliste (telle loi « et son monde »), condamnant sans appel la violence policière et judiciaire (« tout le monde déteste la police »), mais aussi une volonté de rejoindre les luttes invisibles menées par les plus précaires , les plus discriminés (manifestation à Bobigny suite au viol de Théo, rapprochement avec le collectif de soutien à Adama Traoré, interventions contre les expulsions de camps de migrants à la Chapelle...). C’est ce débordement-là qui fait peur au pouvoir , celui qui, par exemple, déplacerait des foules d’étudiants ou de cheminots en lutte vers une manifestation de soutien au peuple palestinien ou encore auprès des sans-papiers réclamant vérité et justice pour Ismaël Deh mort tué par la police ce même premier mai. Les étudiants de Paris 8 ne l’oublient pas en appelant à défendre l’occupation du bâtiment A de leur fac par 146 exilés qui tient depuis presque 4 mois (voir RE 170 ) mais est aujourd’hui sérieusement menacée par le pouvoir qui ne veut rien céder : répondons à leur appel en les rejoignant sur leur fac le 15 juin prochain .



> chronique de l’arbitraire

Les différentes formes de la répression
La tradition de la matraque. Côté étudiants, après Tolbiac d’autres facs ont été violemment évacuées, mais certaines sont toujours occupées. Les étudiants se sont également efforcés de bloquer, souvent avec réussite, la tenue des examens, pour beaucoup délocalisés sous surveillance policière. Là encore, la matraque était au rendez-vous. Ainsi, à Arcueil, où devaient se tenir les partiels de Nanterre et de Sciences Po Paris.
Un blessé grave par grenade. Le 9 mai dès 3h45 du matin les forces de l’ordre évacuent l’université Jean Jaurès à Toulouse. Les étudiants sortent en lignes les bras levés. Un grand nombre d’entre eux prennent la direction de la gare de Toulouse-Matabiau pour y rejoindre les cheminots en grève. La BAC est sur place. Plusieurs schmidts sautent sur Guilhem, 24 ans. Dès la sortie de la fac, il s’était senti photographié et « ciblé » sans savoir exactement pourquoi. Un flic le saisit au cou, un autre par les bras, pendant que d’autres font usage de gaz lacrymogène, ajoutant à la confusion. Un flic sort de sa poche une grenade de désencerclement qu’il dégoupille (accidentellement selon les flics) Guilhem est grièvement blessé. Au sol il reçoit encore coups de pied et insultes. Résultat : une opération est envisagée en raison de présence de sang et d’air entre la plèvre et le poumon. Sa rate a aussi été touchée et il souffre d’une brûlure au second degré au bras. Il porte des ecchymoses au visage, qui ne sont certainement pas le résultat de l’explosion de la grenade. À noter que Guilhem pourrait toujours être poursuivi… Infos : https://lundi.am/Toulouse-l-etudiant-grievement-blesse-par-la-police-temoigne
Une nouvelle attaque fasciste. Le 11 mai une trentaine de militants d’extrême droite se sont invités sur le site Malesherbes de l’université Paris-Sorbonne dans le but évident d’agresser les occupants et de tout saccager. Une personne a été blessée à l’œil, des ordinateurs ainsi que d’autres effets personnels ont été volés.
L’infiltration policière. Le 10 mai lors d’une AG de l’occupation de Paris 8 des étudiants repèrent un individu au comportement étrange. Le prenant à part pour lui parler, les étudiants remarquent un fil dépassant de sa sacoche, relié à un bouton sur la sangle et qui s’avère être une caméra. L’espion qui voulait prendre la fuite, sera délesté de son matériel d’espion : camera bouton, boîtier d’enregistrement avec carte SD, micro… Infos : https://paris-luttes.info/paris-8-occupee-les-etudiant-e-s-10217
Le procès d’intention. Un étudiant tourangeau a été condamné à payer 100 jours-amendes à 8 euros, ainsi 150 euros d’amende pour s’être protégé des gaz lacrymogènes. À cela s’ajoute un mois de prison avec sursis pour refus de prise d’ADN et 127 euros de frais de justice. Le 5 mai pendant le rassemblement intitulé la « fête à Macron » à Paris, il s’était protégé le visage lors d’un gazage, actes requalifiés par le tribunal en « attroupement en vue de commettre des violences » Infos : https://larotative.info/fete-a-macron-un-etudiant-2778.html
Le tribunal 2.0. Dès le 3 mai le nouveau tribunal porte de Clichy a réservé une salle à part pour les comparutions immédiates, résultat des arrestations du 1er mai . Une salle de « délestage » pour mieux cloisonner, « briser la solidarité entre les différents prévenus, les "politiques" et les "sociaux" ainsi qu’entre leurs soutiens, qui ont tant à faire ensemble… » comme nous l’explique le compte-rendu de la Legal Team Paris. Architecture froide, des caméras presque à chaque mètre, des cages en verre pour accueillir les prévenus, c’est dans ce décor que la justice est venue parfaire la répression policière distribuant condamnations, contrôles judiciaires et autres détentions provisoires.
Les gaz lacrymogènes. C’est une arme plutôt commune chez les forces de l’ordre, utilisée en masse pour peu qu’une mobilisation dérange ou se vénère, pourtant leurs effets ne sont pas anodins. Street Medic Paris enquête sur le sujet depuis 2 ans, mais depuis peu les récits de nouveaux symptômes leur sont parvenus comme des pertes de connaissance dans les 48h… Ils invitent à venir témoigner sur leur page : https://www.facebook.com/Streetmedicparis/
Produits de Marquage Codés, PMC. Ces produits mêlés au gaz lacrymogène ou à l’eau des canons, se fixent sur les vêtements ou sur la peau. Difficile à faire partir (ils persistent trois à quatre semaines sur la peau et même plusieurs mois sur les vêtements en dépit des lavages), invisibles, inodores et incolores, ils se dévoilent sous une lampe à ultraviolet. En cours de rodage lors de la manifestation du 1er mai ? Certains témoignages le laissent à penser…

« Rien n’a changé à Seysses »
Le samedi 14 avril 2018, J. est mort au mitard de la prison de Seysses (Voir RE 172). Les autorités parlent de suicide par pendaison, pour les prisonniers il a été battu à mort par l’équipe de surveillants responsables du quartier disciplinaire. Le même jour un autre prisonnier s’est suicidé. Les prisonniers « dénoncent le climat de peur qui règne à la maison d’arrêt et la gestion de la détention par des surveillants brutaux et une direction complice. » Extrait de : http://lenvolee.net/rien-na-change-a-seysses-un-nouveau-communique/

« La vérité et rien que la vérité pour Monsieur Deh ! »
c’est ce qu’ont réclamé les manifestants (collectifs de sans-papiers, militants contre les violences policières, familles et soutiens de personnes tuées par la police) le 11 mai à proximité du ministère de l’intérieur. Monsieur Deh était sénégalais, l’État lui refusait des papiers depuis 18 ans alors il survivait en vendant des objets aux touristes, il était marié et avait des enfants ; Ismaël Deh n’est pas mort accidentellement renversé par un véhicule de police alors qu’il travaillait avec 10 autres vendeurs aux abords du château de Versailles le 30 avril, c’est la police intervenue pour les chasser qui a tabassé Ismaël jusqu’à lui faire perdre connaissance ; emmené par les pompiers à l’hôpital, il y est mort le lendemain à midi sous les yeux de ses proches. Un nouveau rassemblement a eu lieu le vendredi 18 mai à 17h devant le Consulat du Sénégal, 150 manifestants très déterminés ont réclamé qu’une contre autopsie soit prise en charge par les autorités sénégalaises maintenant que le corps a été rapatrié.

Procès BDS à Versailles
L’État sioniste accompagne ses massacres de masse, comme à Gaza, par une campagne pour faire taire les soutiens du peuple Palestien en les accusant d’antisémitisme. C’était le sens du procès intenté par l’État français et une organisation sioniste française à Olivia Zémor, présidente de CAPJPO-Europalestine, pour avoir demandé (en 2011 !) à Vanessa Paradis de ne pas aller chanter à Tel-Aviv. Une victoire : le 14 mai le tribunal de Versailles a prononcé sa relaxe.

« Que se passe-t-il au commissariat d’Argenteuil ? »
Le rassemblement devant la sous-préfecture d’Argenteuil du mardi 15 mai, appelé par le collectif « Argenteuil – Stop – Violences – Policières » a permis à de nouvelles victimes d’un usage disproportionné et abusif de la force lors de contrôles d’identité ou d’interventions de la BAC de témoigner, après qu’ils aient déposé plainte auprès de l’IGPN.
De nombreux jeunes, mais aussi des parents, ont reçu à cette occasion le soutien d’autres collectifs contre les violences policières. L’entrevue sollicitée pour une délégation a été refusée par la sous Préfète.

Procès du « 8 juillet »
Réquisitoire : 2 ans de sursis et 1 an sans son « joujou » pour l’ancien champion de tir éborgneur de Joachim. 7mois sursis pour les deux autres cowboys. Plaidoiries : Relaxe générale et renvoi au Tribunal Administratif. L’incompétence de la cour pénale au profit du TA devient systématique. Une volonté de déresponsabiliser les flics pour installer une part de responsabilité chez les victimes. Encore des faux en écritures publiques révélés dans l’affaire sans déclenchement d’enquête. Verdict le 21 juin.

Stop à la gestion coloniale de nos quartiers !
« Des militaires à Beaumont sur Oise, dans le quartier de Boyenval, alors que nous organisions un événement familial en soutien aux prisonniers politiques du combat “Justice pour Adama”. Voilà la réalité des quartiers quand tu t’organises politiquement, comme disait le MIB, c’est la gestion coloniale des quartiers. » Extrais de la page facebook La Vérité pour Adama

> agir

11 après... pour Lamine Dieng
Mort écrasé par quatre policiers en juin 2007, la justice a décidé d’un non-lieu en 2017. 11 années après, sa famille et ses soutiens réclament toujours vérité et justice. Samedi 16 juin, dès 12h : projection, conférence de presse, marche à 14h, village militant/concerts à partir de 18h. Local de la FASTI, 58 rue des Amandiers, métro Père-Lachaise ou Ménilmontant, Paris. https://paris.demosphere.eu/rv/62024

Manifestation contre le projet de Loi Asile-Immigration
Le collectif de sans-papiers IDF appelle avec plein d’organisations à une manifestation le 2 juin, à partir de 14h au départ de la place de la République face à un projet de loi : » raciste et liberticide qui légitime encore plus la chasse aux étrangers, les contrôles policiers, les mesures d’enfermement, y compris pour les enfants, et les idées du Front National ». https://paris.demosphere.eu/rv/61842