Comment le monstre se construit ?

bulletin numero 156 - octobre 2016


11 octobre 2016


Comment le monstre se construit ?

RESISTONS ENSEMBLE / bulletin numéro 156 / octobre 2016


Comment le monstre se construit ?

La structure d’un corps humain comprend 206 os et 600 muscles. Le monstre-État démocratico-fascisant qui nous attend en a au moins autant. Contrairement à l’humain, il ne naît pas tout construit. C’est le pouvoir, ses institutions, ses partis de gouvernement qui fabriquent son squelette et les muscles selon les besoins du capitalisme de notre temps. Pour continuer de préserver le droit des riches à s’engraisser sur le dos des pauvres, le régime encore habillé de sa feuille de vigne « démocratique » doit être transformé, renforcé, musclé et replâtré afin d’être capable d’écraser toute résistance et organisation du côté des pauvres.
Lois « sécuritaires », instauration de l’« état d’urgence » permanent permettent de criminaliser en toute légalité tout ce qui bouge ou pourrait bouger (militants, salariés en lutte ou habitants des quartiers populaires), de débrider le racisme et l’islamophobie et d’ouvrir la chasse aux pauvres, aux immigrés, aux Rroms... Les prochaines agressions peuvent même être programmées et sont publiquement annoncées : celle des 10 000 réfugiés de Calais par la destruction de la « jungle » et celle des résistants de Notre-Dame-des-Landes par la prise d’assaut de la ZAD.
Et voilà, la « gauche » au pouvoir a fait le boulot : le squelette du monstre-État est en place.
Que commence sa musculation.
De nouvelles armes et de nouveaux hommes en armes apparaissent. Après le fusil d’assaut HK G36 que les gendarmes ont sorti à Beaumont face aux manifestants pour Adama, les CRS expérimentent déjà un laser d’aveuglement, le LDI, « laser de dissuasion et d’interception ».La RATP et à la SNCF sont désormais en droit d’armer leurs agents en civil et une nouvelle brigade anti incivilités est créée à Paris. Après la systématisation des nassages de manifs (nouvelle méthode pour ériger des murs au gré des besoins), un mur en dur est construit à Calais à l’image de celui en barbelés en Hongrie.
Le monstre-État est maintenant mis à nu, il ne peut plus se cacher derrière sa feuille de vigne « démocratique » qui, s’étant détachée, est en train de tomber. Il n’attend que les élections pour s’étirer et dire : « me voilà, désormais, la seule loi c’est ma loi ».
Tout n’est pas encore joué. Des luttes contre les violences et crimes policiers s’étendent, une explosion sociale, sur la lancée des luttes contre la loi « travail », est encore possible. Sans rien miser, évidemment, sur les élections, la bête immonde peut être encore défaite.




Adama Traoré – la lutte continue

Les gendarmes ont laissé mourir Adama Traoré sur le sol de la cour de la gendarmerie, par une chaleur caniculaire, menotté dans le dos, face contre terre, alors qu’il avait fait un grave malaise dans le véhicule...
Le sapeur-pompier qui est intervenu a dû demander par 2 fois que les menottes soient retirées pour procéder au massage cardiaque, mais il était trop tard !
Tout est mis en œuvre, dès le constat du décès par les forces de l’ordre, avec l’aide des procureurs, et le relais des médias, pour faire croire que les causes de la mort sont incertaines et surtout qu’elles n’ont aucun rapport avec... l’interpellation ! Dissimulations, mensonges, manipulations se multiplient pour assurer l’impunité des responsables de la mort, mais on vient d’apprendre que le témoignage du pompier secouriste infirme la version des gendarmes !
Petit à petit, la vérité se révèle et Assa, la sœur d’Adama peut crier au meeting de la fac de Tolbiac le 6 octobre : « ils ont fait mourir mon frère comme un chien ! Nous combattrons jusqu’au bout pour que justice lui soit rendue ! ». C’est dans ce sens qu’une association Adama sera créée à sa mémoire et pour réclamer la vérité pour toutes les autres victimes de la police.




> [ C h r o n i q u e d e l ’ a r b i t r a i r e ]

Médiation par les coups
À Toulouse le 14 septembre , dans une station du quartier populaire Bellefontaine, des médiateurs de l’association Medso sous-traitante du métro toulousain Tisséo, veulent évacuer hors de la gare un groupe de jeunes gens afin de « réguler les flux ». L’un des jeunes, 18 ans, est entraîné à l’écart de ses amis, « dans un coin ». Ceux-ci le retrouvent quelques minutes plus tard à terre, vomissant du sang. Hospitalisé, il souffre de plusieurs oedèmes au cerveau et a une oreille décollée. Il ne se souvient de rien, reconnaît difficilement ses proches et a frôlé la mort selon les médecins. Une enquête a été ouverte et le médiateur qui l’a agressé a été mis à pied non sans avoir d’abord osé déposer plainte pour coups et blessures…

Traqués jusque dans le quotidien
À Paris, un nouveau service de sécurité a été créé, intitulé « direction de la prévention de la sécurité et de la protection » qui regroupera à terme 1900 agents et a pour mission la « lutte contre les incivilités » ou « les mauvais gestes du quotidien » comme jeter un mégot (68 euros d’amende), faire trop de bruit (de 45 à 180 euros), vendre à la sauvette (3750 euros et 6 mois de prison). Pour cela, ils pourront outre leur carnet de souche, être munis d’un tonfa et de bombes lacrymogènes. Côté métro et train, le décret d’application de la loi Savary votée en mars dernier (voir RE 148) prévoit désormais que les agents en civil des milices chargées de la « sécurité » dans les transports puissent porter (et donc utiliser) des armes à feu. Histoire d’en rajouter une couche la RATP a lancé une campagne d’affichage odieuse (dont l’iconographie particulièrement ridicule a été vite épinglée et moquée par des internautes) à l’adresse des « fraudeurs » (ceux qui n’ont pas pu ou voulu payer leur ticket à 1 euro 90 !) : « dans les transports la fraude répétée c’est maintenant jusqu’à 6 mois de prison et 7500 euros d’amende » ; « fuir lors d’un contrôle c’est maintenant 2 mois de prison et 7500 euros d’amende » ; « des agents » (armés donc) « peuvent vous retenir jusqu’à l’arrivée de la police ». Mais dans quel monde vivons-nous ?

Manif du 15/9 : répression judiciaire et œil perdu
C’est devenu fréquent, depuis quelques mois avec le mouvement contre la « Loi Travail » et son monde, un ou des manifestant.e.s repartent blessé.e.s, parfois gravement. Le 15 septembre, première manif depuis la rentrée, on retrouve le même schéma : des fouilles multiples, des militant.e.s interpros nassés car refusant d’être fouillés, une présence policière massive et des échauffourées en clôture. Côté répression : 17 interpellations à Paris, 62 dans toute la France ; 8 comparutions immédiates, dont 2 condamnations pour jet de projectile et rébellion (6 mois ferme pour l’un, 1500 euros d’amende pour le second) et un nouveau drame survenu pour Laurent, militant de SUD Santé-Sociaux 94. Alors qu’il discutait calmement, un CRS lança une grenade de désencerclement : Laurent reçut des éclats de grenade qui lui firent perdre un œil. Laurent a dû attendre une heure avant d’être secouru par les pompiers alors qu’au même moment, un CRS blessé fut secouru, notamment par des militant.e.s du même syndicat que Laurent... À votre avis, le flic qui a lancé la grenade va-t-il être condamné ? Cela dépendra de notre réaction.

Béziers : encore « une mort naturelle » entre les mains de la police
Ça s’est passé dans la nuit du 19/9 à Béziers. Un homme seul de 46 ans déambule en caleçon dans la rue. Les riverains appellent la police. Rien moins que trois ( !) équipes de flics, d’État et municipaux, s’occupent de lui. Il est « maîtrisé », calmé à coup de lacrymo, puis jeté par terre, les bras menottés derrière la tête. Il commence à s’étouffer, puis il arrête de respirer. Et c’est fini. Le procureur parle d’une mort « naturelle ». Ça vous rappelle quelque chose ? Mais oui, c’est comme ça qu’Adama Traoré est mort, 2 mois avant, le 19/7, entre les mains des gendarmes. Lui aussi « naturellement ». L’homme de Béziers est resté anonyme pour le moment, faute, sans doute, d’une mobilisation de solidarité et d’une famille déterminée à le soutenir. Comment faire en sorte qu’un droit « à la vérité et à la justice » soit revendiqué pour lui aussi ?

L’arsenal répressif de terrain se renforce
Le HK G36 est un fusil d’assaut avec une « portée pratique » de 500 m et une cadence de tir de 750 coups par minute. C’est une arme de guerre, fabriquée pour tuer.
Le faisceau du laser de « dissuasion et d’interception » LDI est efficace à plus de 500 m. Le fabricant nous rassure : il est muni d’un « dispositif électronique de réduction de risque oculaire ». Donc les risques de rendre aveugle existent bien, on nous promet qu’ils seront simplement « réduits ». Rappelons que lors de la mise en service du flashball, en 2002, on nous avait annoncé que le « risque oculaire » n’existait pas, le diamètre d’une balle étant supérieur au diamètre de l’orbite oculaire, par conséquent l’œil ne pouvait pas être touché. On connaît la suite avec des dizaines de mutilés à l’œil. Le flashball crève un seul œil, avec un seul tir de faisceau du LDI, les deux yeux pourront être détruits.

Liberté de circulation et d’installation pour tout.e.s !
Chaque année le nombre d’hommes et de femmes qui meurent en cherchant à rejoindre l’Europe augmente. Depuis début 2016, 17 personnes sont mortes chaque jour selon l’Organisation internationale des migrations (OIM). Les réfugiés s’embarquent de plus en plus nombreux sur des bateaux de fortune comme le 26 mai, lorsque près de cinq cents personnes ont péri noyées.
Dans le drame qui se joue là, l’Europe a les mains sales : aux difficultés du voyage s’ajoute l’aridité de sa politique migratoire. En août dernier, Frontex, la police des frontières à l’échelle du continent, a vu sont mandat étendu, elle se dote d’un corps de garde-frontières aux moyens renforcés. Mais avant ça déjà les gardes-côtes sous sa houlette n’hésitaient pas à percuter les embarcations, à ouvrir le feu. Belal Tello est mort en décembre 2015 suite à une blessure par balle à la tête. Rawan marche en boitant depuis qu’elle a été atteinte dans le dos, blessée comme d’autres par les tirs des gardes-côtes lors de sa traversée en mer Égée. Les balles étaient encore dans leur corps lorsqu’ils ont quitté la Grèce pour rejoindre leur pays d’accueil. Comme à chaque fois dans ce genre d’affaires, un tribunal a estimé que les agents de l’État avaient respecté les règles.
En France, le mur des frontières se poursuit à l’intérieur. L’État le construit de barbelés comme à Calais, ou de CRS comme le 1er octobre face aux quelque 300 personnes présentes malgré l’interdiction de manifester, dans la Jungle, noyée sous les gaz. Ce jour-là 4 bus venus de Paris étaient stoppés à 30 km de l’arrivée par les forces de l’ordre. Le gouvernement a promis l’évacuation de cette ville dans la ville. Un millier de policiers, CRS, BAC, police municipale… sont prêts à intervenir, nous dit-on. La date prévue, comme un symbole, le 17 octobre, triste anniversaire du massacre des Algériens à Paris par la police française.

Zone À Défendre
Depuis l’opération César de 2012, tentative échouée d’expulser la ZAD, le gouvernement poursuit son but. Les travaux pour l’implantation de l’aéroport peuvent officiellement commencer depuis la publication des derniers arrêtés préfectoraux et le verdict d’un référendum biaisé. Manuel Valls avait promis de les engager dès l’automne 2016. Les signes d’une intervention se multiplient et celle-ci peut survenir à tout moment…
Mais la résistance s’organise, contre ce projet nuisible, mais plus encore pour défendre et déployer des zones d’autonomie face au pouvoir et à l’économie marchande. Le samedi 8 octobre, une manifestation dans le bocage regroupait autour de 40 000 personnes.
Infos sur zad.nadir.org et acipa-ndl.fr.




> [ A g i r ]

Convergeons - organisons nous contre la répression !
Sans fouille, sans nasse et sans papiers. Samedi 15 octobre 2016 à 12h30 - Manifestation en soutien aux inculpés et contre les violences policières Place de la République, métro République ; https://paris.demosphere.eu/rv/50444

Un Cabaret d’Urgence
est organisé par la Compagnie Jolie Môme le16 octobre. Cartoucherie. Route du Champ de Manœuvre 75012 Paris. En soutien aux victimes de la répression, dont Loïc, agressé par le chef de la sécurité du MEDEF mais accusé de violence (voir RE n°154 ), son procès est prévu le 8 décembre.

Les 8 de Goodyear
(qui avaient écopé en première instance de 9 mois ferme pour avoir gardé pendant 30h deux cadres de l’usine qui avait fermé mettant les salariés sur le carreau, alors que la plainte avait été retirée) passent en appel à Amiens les 19 et 20 octobre. Un village militant est organisé, on peut donc s’y rendre en nombre, des cars sont affrétés. https://paris.demosphere.eu/rv/49140

Le « Collectif 17 octobre 1961 Banlieue Nord-Ouest »
qui rassemble des habitants et militants des villes d’Argenteuil, Bezons, Colombes, Gennevilliers et Nanterre, lance un appel à se rassembler le 17 octobre prochain pour commémorer le 55ème anniversaire de cette terrible nuit. Pour toutes les victimes, dont celles jetées dans la Seine, sur les ponts de Bezons, Neuilly, Argenteuil par les forces de police. A Argenteuil conférence-débat avec E.Blanchard et rassemblement à la stèle de Maurice Audin.

Défense du centre social Attiéké
Samedi 22 octobre - Manifestation, soupe, cotillons et tambours RDV à 10h30 à la gare de St-Denis puis squat devant la mairie à partir de 11h30 ; Lundi 24 octobre- Procès ;RDV à 9h au tribunal d’instance de St-Denis, place du Caquet, métro Basilique contact : collectifattieke.wordpress.com

Georges Ibrahim Abdallah
Samedi 22 octobre à 14h manifestation à Lannemezan (65) devant la prison où Georges Ibrahim Abdallah commencera une 33e année de détention. Pour la libération de ce militant militant communiste, combattant pour la lutte de libération de la Palestine. https://paris.demosphere.eu/rv/50003