28 janvier 2005


À Rennes, résistance à la délinquance policière !

Du "Collectif Antisécuritaire de Rennes"


Depuis quelques temps déjà les violences de routine de la police à
Rennes se confinaient au harcèlement des sans-abris et des ‘zonards’
(déplacements, envois fréquents au poste) et aux contrôles aux faciès
contre les personnes d’« origine étrangère ». A cela s’ajoutait les
descentes occasionnelles contre les fameuses « atteintes à l’ordre
public » (squats fermés de force, répression violente de manifs pour la
légalisation des raves-parties ou pour le soutien aux personnes
sans-papiers, intervention contre les occupations d’usines comme à
STMicroélectronics). La présence quotidienne de la police sur les
principales places de Rennes (et de l’armée dans la gare) s’était
imposée progressivement sans réaction collective, sous la coupe
bienveillante du « socialiste » Edmond Hervé siégeant depuis plus de 20
ans à la Mairie...

Pour mettre de l’huile sur le feu, la nouvelle préfète Mme Malgorn,
ex-conseillère de Sarkosy, sera la femme de la situation. Début 2004,
elle ordonne la fermeture des bars de Rennes à 1H du matin, puis des
épiceries, au nom d’une lutte contre l’alcoolisme. En avril, elle
déclare la guerre : suite aux plaintes d’une association regroupant des
propriétaires du centre ville de Rennes (dont le ‘tapage nocturne’ fait
baisser les rentes), adressées aux autorités rennaises et à Chirac en
personne, une circulaire autorise les C.R.S. à faire le ménage tous les
jeudis soirs contre les fêtes étudiantes du jeudi soir...qui avaient
librement cours depuis près d’un demi-siècle.

Moins d’une semaine après la circulaire dont personne ne connaissait
l’existence, 3 corps de police (C.R.S., BAC et Police Nationale) sont
mobilisés sur place pour se partager le travail, frappant sans sommation
les étudiants, travailleurs, lycéens et autres fêtards ; un handicapé
sera violemment jeté de son siège et frappé à terre, plusieurs personnes
hospitalisées et 12 personnes incarcérées.

Une bavure ? Non. La semaine suivante et celles d’après, les C.R.S.
continuerons à être mobilisés, venant de toute la France, pour casser du
jeune. Après la trêve des vacances scolaires, la répression recommence
chaque jeudi soir à partir d’octobre. Entre 14 et 16 cars de C.R.S.
(soit au moins 500 casseurs de grève assermentés) sont mobilisés chaque
fois, combinant des moyens des plus primaires aux plus modernes
(matraquages, charges, grenades lacrymos, char projetant jusqu’à une
centaine de mètres de puissants jets d’eau lacrymogénés) et transformant
rituellement le centre de Rennes en champ de bataille. Loin de fuir face
à la répression, des centaines de jeunes reviennent de semaine en
semaine, tenant la place face aux « forces de l’ordre » dans une
ambiance de véritable guerre sociale.

Pour aller plus loin dans la provocation, le maire et la Préfète se sont
entendus pour interdire le « Teknival » qui avait maintenant lieu tous
les ans en marge du festival des Transmusicales de Rennes. Pendant les
trois jours de l’évènement la préfecture à mis sur pied un « centre
opérationnel défense » officiellement destiné à assurer la « sécurité ».
Comme conséquence logique de l’interdiction, des centaines de jeunes se
sont retrouvés dans le centre ville de Rennes, sans tecknival. Face à
eux, des centaines de C.R.S. mobilisés pour l’événement ont profité du
premier ‘débordement’ le vendredi soir (l’investissement d’un manège par
la foule) pour frapper dans le tas et nettoyer violemment la place à 4H
du matin.

Résultat : une trentaine de personnes hospitalisées, 6 personnes
incarcérées et condamnées (3 ou six mois de prison avec sursis). C’est
cette nuit là que des personnes furent sélectionnées au faciès (des
noirs et des arabes), menottées, plaquées contre un mur et tabassées en
règle.

Aux chaînes de télévision et de radio nationales, on pouvaient entendre
le témoignage outré de « riverains » se plaignant d’une montée de
délinquance insoutenable, et la justification béate d’une intervention
de police contre des casseurs de vitrines opérant « juste devant leurs
yeux ».

Le jeudi suivant, les 16 cars de C.R.S. avaient été mobilisées. Mais les
élus et la presse étaient sur place, et ils se gardèrent d’une
quelconque intervention ! La semaine suivante, le manège était reparti...

Trop c’est trop !

L’explosion des violences policières devait générer une riposte
collective. Elle est partie du secteur étudiant, à son tour plein champ
de la répression policière, plutôt réactif et politisé, fraîchement
sorti d’un puissant mouvement de grève. A quelques dizaines, nous avons
lancé un collectif contre les violences policières et sécuritaires,
gagnant le soutien d’un certain nombre d’associations et organisations
(A.C.G., Collectif contre les lois d’exclusions, JCR, LCR, FA...) ou
provisoirement d’une partie de leurs membres (Verts, MRAP, CNT,
collectif de soutien aux personnes sans-papier, etc.).

Un premier appel à été lancé et proposé largement. Nationalement, nous
avons pris contact avec le réseau Résistons Ensemble regroupant des
collectifs et assos contre la répression. Nous organisons une conférence
sur le thème de l’ordre sécuritaire le 1er février et appellons à
manifestation large contre les violences policières, le mercredi 2
février, à Rennes. Un bulletin d’information est lancé et la réalisation
d’un film est au programme.

L’élément déclencheur de la création du collectif est la répression
violente des rassemblements festifs à Rennes. Mais ses objectifs ne s’y
limitent pas et préfigurent une véritable campagne de fond contre
l’ordre sécuritaire.

Comme le souligne l’appel fondateur du collectif : « Nous condamnons
tout acte de violence policière, de la plus flagrante à la plus
banalisée. [...] Nous rejetons la logique du « tout sécuritaire »
désignant comme ennemi public et comme coupable les populations qui sont
précisément les plus touchées par l’exclusion, la misère et la violence
sociale. A la « tolérance zéro » (braquée sur la petite délinquance sans
jamais s’attaquer à la grande criminalité en costard), nous opposons le
règlement social des problèmes sociaux : des emplois pour tous, des
logements pour tous, une éducation pour tous et les mêmes droits pour
tous, quelle que soit l’âge, le sexe, l’origine et la couleur de peau.
Nous demandons le blocage des budgets régaliens (armée et police) au
profit des budgets sociaux (éducation, santé, services publics). Nous
demandons par conséquent l’abrogation de toutes les lois et décrets
nationaux mettant en péril les libertés civiles et la sécurité des
individus au nom de l’exigence « sécuritaire » voire « antiterroriste »
 : Lois sur l’immigration Pasqua-Debré-Chevènement) ; « Loi sur la
Sécurité Quotidienne » (LSQ) du 30 octobre 2001 ; « Loi de Programmation
pour la Justice » (LOPJ, dite loi Perben) du 9 septembre 2002 ; « Loi
d’Orientation pour la Sécurité Intérieure » (LOPSI, dite loi Sarkosi) de
février 2003 ; « Plan Vigipirate renforcé », relancé le 9 mars 2003 ;
Loi dite Perben II de février 2004 ; loi Ferry-Stasi de février 2004 ;
ainsi que tous leurs clones. »

Multiplions les initiatives dans ce sens et fédérons nos efforts !